V-) La datation au carbone 14
Le carbone est un élément chimique constitué à 98,89% de carbone 12 à 1,108% de carbone 13 et enfin à 10-10 de carbone 14. C'est cet isotope du carbone qui est radioactif et dont les propriétés permettent la datation des objets et des corps morts.
a) L'origine du carbone 14 chez les êtres vivants :
Les protons cosmiques, en provenance d'autres galaxies, sont déviés par le champ magnétique terrestre et donnent des neutrons par choc avec les molécules d'oxygène ou d'azote de l'air. Ces neutrons interagissent à leur tour avec l'azote 14 présent naturellement dans l'atmosphère, selon la formule suivante :
147N + 10 n → 146C + 11H
Ensuite ce carbone 14 s'oxyde et forme du 14CO2 qui va être absorbé, de la même manière que le CO2 non radioactif, d'une part par les océans et d'autre part par les plantes, selon le mécanisme de la photosynthèse. C'est ainsi que le carbone 14, élément radioactif, entre dans la chaîne alimentaire, ce qui justifie sa présence au sein de tous les êtres vivants. Tant qu'ils sont en vie, ces êtres vivants contiennent donc, dans leurs tissus et leur squelette , une proportion de carbone 14 qui reste constante, car il est renouvelé en permanence (au même titre que les autres isotopes du carbone). Par ailleurs cette proportion est égale à celle qui se trouve dans le CO2 atmosphérique, qui est supposée constante depuis environ 40 000 ans.
b) Les propriétés du carbone 14 :
Les organismes fixant le carbone de l'atmosphère contiennent donc lors de leur métabolisme les deux isotopes 12C et 14C dans des proportions qui sont celles de l'atmosphère. Lorsque l'organisme meurt, son métabolisme cesse et le rapport 14C/12C diminue à cause de la décroissance radioactive du 14C. En effet le carbone 14 est un émetteur radioactif de type β qui se désintègre selon le schéma suivant :
146 C →0-1β- +147N
La période de cet élément radioactif est de 5730 ans (plus ou moins 40 ans). Cela signifie que la quantité de carbone 14 est deux fois moins importante à la fin de chaque période , d'où l'expression « demi-vie » employée pour désigner ce phénomène.
Ainsi, la désintégration du carbone 14, comme tout élément radioactif, peut être considérée comme une véritable « horloge » car elle se fait en suivant une loi mathématique immuable de décroissance exponentielle en fonction du temps : quelle que soit sa quantité initiale, il lui faudra toujours le même temps pour qu'elle soit réduite de moitié par désintégration.
Connaissant la période de désintégration du carbone 14, il est donc possible de calculer depuis quand elle se déroule à l'intérieur de l'organisme étudié (et donc de déterminer la date de sa mort) en mesurant la quantité de carbone 14 qu'il contient. Soit A (t) la radioactivité d'un échantillon. Notons A0 son activité initiale, qui est celle au moment de sa mort. A l'instant de date t après la mort de l'échantillon, son activité A vaut :
A(t) = A0 *e-λt
Avec :
- A, l'activité du carbone 14 d'un matériau au temps présent
- A0, l'activité 14C du carbone à sa mort
- λ, la constante de désintégration égale à 0,693/T (T=période)
- A0, l'activité 14C du carbone à sa mort
- λ, la constante de désintégration égale à 0,693/T (T=période)
Cette formule exponentielle permet d'écrire :
La détermination de la quantité de carbone 14 dans un échantillon peut se faire par comptage des atomes de carbone 14. Dans ce cas, les scientifiques utilisent la spectrométrie de masse par accélérateur (SMA) qui permet de transformer les atomes de carbone de l'échantillon en un faisceau d'ions mesurable grâce à des techniques très sensibles de la physique nucléaire (qui élimine une grande partie des isotopes du carbone 14).
La quantité nécessaire pour procéder à l'analyse varie de 5 mg à 2 g selon le matériau et son état de conservation.
Principe :
Les échantillons à dater sont généralement réduits à l'état de poudre avant d'être introduits dans la source de l'appareil SMA. Ils sont tout d'abord bombardés par des ions césiums afin de produire un faisceau d'ions négatifs constitués de 12C- ; 13C-; 14C- ; 12CH2- ; 13CH- etc.
Un premier aimant effectue alors une sélection des ions de masse 14. Ce faisceau, porté à très haute énergie grâce à la tension de plusieurs millions de volt régnant dans l'accélérateur, entre en collision avec des molécules gazeuses présentent au centre de la machine ; les ions complexes comme 13CH- ou 12CH2- sont cassés puis épluchés de quelques électrons. Après avoir subi une nouvelle accélération dans la seconde partie de l'accélérateur, le faisceau constitué majoritairement d'ions 12C3+; 13C3+ et 14C3+ est guidé vers un dispositif électromagnétique permettant une séparation fine des trois isotopes. Tandis que les ions 12C et 13C sont comptés par des instruments appelés cage de Faraday, les ions 14C pénètrent dans un détecteur capable de les compter en mesurant leur énergie et leur perte de vitesse.
NB: La durée d'analyse d'un échantillon peut varier de quelques secondes à quelques minutes. Toutefois, si l'on souhaite obtenir une mesure des plus précises, plusieurs cycles d'analyse seront effectués jusqu'à obtenir à un temps total de comptage d'une heure environ.
Avantages de la SMA par rapport aux anciens outils de mesure par datation du carbone 14 :
La diminution du temps d'analyse et surtout la faible quantité d'échantillon à prélever pour effectuer l'analyse ont amenés les utilisateurs à considérer la SMA comme un véritable progrès.