II-) Etude des Craquelures

a) Importance de l'analyse des craquelures

Dans un premier temps, les craquelures sont l'ensemble des indices laissés par des contraintes mécaniques et/ou environnementales qui permettent notamment de juger de l'authenticité d'un tableau ou de connaître son passé. Ainsi, cela peut faciliter par exemple sa restauration et conservation.

b) Origine des craquelures

L'existence de craquelures est synonyme de contraintes appliquées à l'œuvre dans son ensemble, c'est-à-dire aussi bien à la couche picturale qu'au verni et même au support. En effet, elles peuvent être dues :

• à une mauvaise consolidation de la couche picturale durant le séchage

• à différents chocs ( contraintes physiques) subis par l'œuvre

• à une mauvaise condition de conservation ( température, hygrométrie ) ou de restauration.

A ces craquelures ajoutons également l'altération chimique qui participe au vieillissement de l'œuvre et parfois à une décoloration du pigment par oxydation, exposition à la lumière (UV)...

c) Les différents types de craquelures

Les fissures peuvent être de différentes natures géométriques. De ce fait, on retrouve des craquelures :

• circulaires dues à des chocs survenus perpendiculairement au plan de la couche.

Georges de la Tour, Saint Matthias: sommet du crâne

• quadrillées : _ soit à cause d'une mauvaise restauration et d'un rentoilage mal effectué.

Georges de la Tour, Saint Jacques le Majeur: une partie du costume

_soit à cause d'un excès d'huile siccative (liant qui facilite le séchage): par exemple les cernes des personnages dans les œuvres de Fragonard.

• longues, fines et parallèles dues à l'enroulement de la toile pour son transport ou son entreposage.

• longues et assez profondes dues à la disjonction des planches du support pour les peintures sur bois.

• fentes aléatoires dues aux mouvements de la toile par des variations hygrométriques et de températures

Fragonard, Le Verrou

• crevasses plus profondes dues à la différence de temps de séchage pour les différentes couches du tableau

d) Les craquelures de séchage

Nous nous sommes penchées plus précisément sur les craquelures ayant pour origine le séchage étant donné que leurs causes nous apparaissaient encore un peu floues. En voici le principe :

• Tout d'abord, le pigment mélangé au liant est posé sur la couche de préparation (pour la composition des différentes couches cf Stratigraphie), nous obtenons la représentation schématique suivante, les cercles représentant les grains constitutifs du pigment.

• Ensuite, la couche superficielle du liant s'évapore. Ainsi les grains de pigment se rapprochent pour former un ensemble compact :

• Or, plus le pigment adhère à la couche de préparation, plus les forces mécaniques dues à l'assemblement des grains vont provoquer l'apparition de fentes. Au contraire, si l'adhésion à la couche de préparation est moindre, l'amalgame pourra se déformer à sa guise.

  
  

Remarque : c'est pour cette raison que l'on préconise « maigre sur gras » ou « gras sur maigre » pour la composition des deux couches liant/pigment et de préparation puisque l'huile (gras) est hydrophobe ( l'eau étant la partie maigre).

Les craquelures de séchage dépendent donc de l'adhérence du pigment à la couche de préparation mais aussi de la nature physico-chimique du pigment:

D'après le tableau ci-dessus, plus les particules de pigment sont molles moins la couche picturale n'est sujet aux craquelures de séchage car les grains sont plus déformables. L'épaisseur de la couche picturale a également une influence: au delà d'une valeur seuil (propre à la nature de chaque couche) des fissures se forment.

e) Conclusion

L'étude des craquelures permet donc d'obtenir de nombreuses explications et informations notamment sur l'authenticité d'une œuvre. Aussi, nous permettons nous de vous demander quel est le tableau original Portrait d'une dame de Roger Van der Weyden, peintre hennuyer du XV^ème siècle, parmi les deux présentés ci-dessous :

(la reproduction est l'œuvre du peintre contemporain,  F.Pari)